Textes d’aujourd’hui pour le théâtre. Ces publications sont régulièrement soutenues par la Région Languedoc-Roussillon, et depuis 2003 par la SACD.
ISBN : 978-2-84705-088-2
EAN : 9782847050882
13x21cm, 88 p., 13,50 €
Distribution multiple
Ouvrage publié avec le soutien du Centre national du livre et de l’Association Beaumarchais
2012
De quelques choses vues la nuit est une sorte de déambulation dans un no man’s land entre terre et enfer. Des voix (âmes errantes, fantômes ?) se font entendre qui cherchent à dire alors qu’elles sont devenues incapables de parole.
En effet, ce que ces personnages ont vu les a terrorisés. Ils sont saisis d’effroi devant la catastrophe. D’où une langue qui ressasse, crie, murmure, s’égare, une langue qui porte solitude et fragments de mémoire.
Et parmi elles, Guide, personnage qui semble effectivement indiquer un cheminement au milieu des ruines.
« On lit quelque part que son auteur aurait décrit De quelques choses vues la nuit comme une “déambulation dans un no man’s land entre ciel et enfer”. Tout semble dit : la guerre encore fraîche, l’errance, un rapport si ambigu à la transcendance et à la foi, et cet espace que ne définit qu’un mince intervalle, une double frontière.
De fait, il s’agit là d’une suite de scènes qui toutes ensemble dessinent une promenade dans le chaos de régions sinistrées, jusque dans une “ville aux sept portes”. Le désastre contemporain s’y pare des couleurs antiques, à la fois tragiques et sombres. Patrick Kermann, fin antiquisant qui publia aussi des traductions d’Euripide et de Sénèque, invente ici un voyage dans les limbes du présent, un périple à travers les Enfers de la mythologie de nos villes, où fleurissent des asphodèles, fleurs des morts, “à travers les ruines d’un empire / montrant des cadavres encore chauds / des palais effondrés / des vestiges de gloire passée”.
De visite en visite, comme au gré d’un curieux tourisme de catastrophe, le spectateur se trouve ici conduit par un « Guide », aux multiples figures. Actualisation du Virgile de Dante, auquel les sept portes, comme les sept cercles de l’Enfer le renvoient, le Guide commente mélancoliquement un monde post-apocalyptique en Monsieur Loyal dérisoire. Il annonce, commente et congédie chacune des silhouettes pathétiques croisées ici et là, et qui font toutes entendre des voix de détresse.
Il est aussi une émanation de la figure de l’auteur, qui veille dans un intéressant et permanent jeu de regard sur l’œuvre, “au respect des lieux / à la sauvegarde du patrimoine / au bon goà »t moral / et stylistique”.
(…) L’habileté de l’écriture de Patrick Kermann, c’est de ne pas tenter de faire parler les morts. Bien au contraire, cette écriture met en scène des êtres infiniment vivants.
(…) Surtout, le théâtre de Kermann porte en lui une vision qui renvoie à ses origines, romantiques ou grecques. Kermann fait du théâtre la chambre d’écho du néant, une bouche d’ombre par où les vivants et les morts communiquent. Ce ne sont ainsi pas seulement les mourants qui y parlent aux vivants, mais les vivants qui viennent y essayer la mort. Une seule définition, définitive : le théâtre est “ce vide, qui se remplit chaque soir / à seule fin de plaisir et d’oubli”. Un “vide”. »
[Emmanuel Leterrier,Le Matricule des Anges, n° 134, juin 2012]
Lecture à Théâtre Ouvert, dirigée par Noëlle Renaude en 1994. Texte primé par le jury des Cartes blanches de Théâtre Ouvert. Publication an Tapuscrit (épuisé).
Mise en onde sur France Culture par Jacques Taroni, 1995, et sur Radio Suisse Romande par Michel Corod, 1996.
Lecture par Noëlle Renaude, la Chartreuse, été 1995.
Mise en espace par Sophie Courade (studio Alain Bock), 1995.
Mise en espace par Michel Didym, Mousson d’été, 1995 et dans le cadre de « Trafic », Nantes, 1997
Mise en espace par Anne-Laure Liégeois, Théâtre Paris-Vilette, 1996.
Création par Solange Oswald et Guy Martinez (groupe Machine Arrière), Toulouse, Théâtre de la Digue, 1996, et Festival d’Avignon, XXIV rencontres de la Chartreuse, 1997.
Publication Phénix éditions, 1999, épuisé.
Article Marie Reverdy, « Le personnage essoufflé l’absence de ponctuation noire dans la partition théâtrale de Patrick Kermann », Littératures [En ligne], 72 | 2015, mis en ligne le 07 décembre 2015, consulté le 01 mai 2016. URL : http://litteratures.revues.org/378