Éditions Espaces 34

Théâtre contemporain

Textes d’aujourd’hui pour le théâtre. Ces publications sont régulièrement soutenues par la Région Languedoc-Roussillon, et depuis 2003 par la SACD.

Extrait du texte

Extrait p. 20 à 23

(…)

moi, l’homme et cetera, qui lorsque je m’appelle Maradona, Diego, joue du ballon de foot qui est une particule qui crée une onde de choc au fond du filet, même si pour marquer j’utilise la main de dieu que je singe, oui, oui, que je singe très bien quand je le veux où je le veux

moi, l’homme et cetera, e égal mc2 mon amour, viens, je suis tombé amoureux de toi comme la pluie tombe sans qu’aucune prévision météo ne l’ait prévue, vive toi, vive l’amour, vive la pluie impromptue et magnifique qui joue des claquettes sur le trottoir middle of the night moi, l’homme et cetera, allant sur le plancher des vaches qui est depuis le 21 juillet 69, 2 heures 56 minutes, une orange bleue

moi, l’homme et cetera, ayant sous la main un filet de pêche, un filet à papillons, quantité d’hameçons et de pièges, possédant l’accélérateur de particules, incapable d’attraper un dimanche alors que c’est mercredi matin et que j’aimerais, pour le jour d’aujourd’hui, autre chose que mon métro, boulot, dodo, tout aussi incapable d’attraper le bonheur qui court toujours dans sa jupe de tarlatane, en portugais tarlatana, en italien tiritana, en latin tariatare, en espéranto taratata cours toujours

moi, l’homme et cetera à la mémoire augmentée et qui ne retrouve plus ses clés

moi, l’homme et cetera Henri Mouhot, explorateur entomologiste et qui en 1860 découvre derrière un papillon que je poursuis avec mon épuisette les temples d’Angkor, axiome : l’hypoténuse de ce que l’on cherche ne passe pas par l’angle droit de ce que l’on trouve dont les deux côtés adjacents n’ont rien à voir avec ce que l’on ne sait pas

moi, espace, l’homme, espace, et, espace, cetera, à la ligne

moi, l’homme et cetera, affirme et confirme, que bien que ne descendant pas du singe, je suis souvent mouton et chèvre et vache et chien et bonobo et renard et langue de vipère et éléphant dans un magasin de porcelaine et loup dans la bergerie et anguille sous roche et vilain petit canard et canard boiteux et hibou, pou, caillou dans ma chaussure

cependant, un matin, moi, l’homme et cetera apprends à l’enfant Pierre, Paul, Jacques, Pierrette, Paule, Jade, que pour beurrer une biscotte il faut en utiliser deux afin que celle du dessus ne se casse pas, tout de même il en connaît un rayon moi, l’homme et cetera

mais, dans quel sens tourne le sang ? dans celui des aiguilles d’une montre ou à rebrousse-poil ? mais, si l’esprit tranche, est-ce à dire qu’il aurait la forme d’une lame ? couteau ou sabre ? mais, quand ils se parlent les oiseaux, utilisent-ils le tutoiement sympathique ou le vouvoiement érotique ? mais si l’espace se réduisait de moitié, mon esprit resterait-il tel quel ou y aurait-il une frontière au beau milieu, barbelé électrifié ou long fleuve tranquille ? mais quand je me voile la face est-ce pour dissimuler l’intelligence que je n’ai pas ?

grand, très grand trou noir que le trou noir de ce que je ne sais, forces et champ gravitationnel dont je ne peux échapper, j’en ai l’âme blessée, les pensées affamées, le corps aspiré, comme une eau nocturne et grouillante qui sans cesse monte, et je m’extrais, cours sur la rive, me rue vers les grands bâtiments qui savent tout, bondis dans les bibliothèques, les labos, parmi les volumes, les éprouvettes, faim à combler, mains à apaiser, manque, manque de tout ce que je ne sais et qui me fait minime parmi les infimes, négligeable dans le banal, moi, homme petit truc de peu

et pourtant et aussi moi, l’homme et cetera, homme imbécile et heureux, idiot et béat, dernier de la classe à côté du radiateur, mais heureux comme tout puisque mon imbécilité crée endorphine qui me fait sourire aux anges, et moi, très cher homme et cetera, homme imbécile et heureux, idiot et béat, qui de la pente ne prends que la descendante, qui semble remercier les anges alors que je séduis les cumulus de peur que le ciel ne me tombe sur la tête en tombereaux de dolmens ou de pluies acides et avides

moi, l’homme et cetera et les étagères de trous que je collectionne

moi, l’homme et cetera et ce que j’entends ou lis et que je prends un malin plaisir à retranscrire dans l’éphémère sable

moi, l’homme et cetera, l’effet papillon, l’effet de serre, l’effet placebo, l’effet que tu me fais, l’effet que je me fais

moi, l’homme et cetera, cetera, taira

moi, l’homme et cetera je suis mort, je mourrai, je meurs, je suis mourant, je me meurs, je suis seul avec mon cadavre, ma parole meurt dans le trop long silence de mon cadavre, rien n’y fait, rien n’y peut, rien ne change, ça continue, ça n’a de cesse, je décède et trépasse et passe l’arme à gauche, même si ça recule, même si ça chimio et opère, même si ça dans les gènes, même si ça dans le cortex, je pousse mon dernier râle, je meurs en état de bon état ou en état de mauvais état, je meurs, je suis mort, je mourrai, je suis mourant tout le temps, à chaque seconde 6 morts, ce qui fait depuis que je parle la coquette somme de 21 600, 21 606, 21 612

conclusion, le monde mange les cadavres, le monde me mangera, la reproduction du monde se fait par le mangeage des cadavres, le monde nous coupe en deux et nous mange pour se reproduire en trois, axiome les mathématiques sont le plongeoir humain par où tout advient

stop, suffit, je sors de moi, allons faire un tour, allons vers d’autres visibilités

la planète est en cristal, je vois tout (…)

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